L'émergence de "profession médicale intermédiaire" fait débat

De nombreux collectifs de professionnels de santé rejette l'idée

Publié le 13 novembre 2020

Définition :
Profession médicale intermédiaire
Une nouvelle profession qui se situerait entre les trois années de formation d’une infirmière et les dix années de formation d’un médecin.

Une proposition parlementaire de loi va être examinée dans les prochains jours, sous le prétexte de traduire des conclusions du Ségur de la Santé.

Les médecins libéraux constatent avec étonnement que cette proposition de loi prévoit la création d'une « profession médicale intermédiaire ». L'exposé des motifs justifie cette création comme une réponse afin d'améliorer l'accès aux soins grâce à une nouvelle profession qui se situerait entre les trois années de formation d'une infirmière et les dix années de formation d'un médecin. Le rôle et les missions de cette profession sont obscurs.

Les médecins libéraux s'opposent très fermement à cette création pour plusieurs raisons :

  • Il est légitime que les professionnels de santé puissent évoluer dans leur carrière ; ceci est en cours pour le corps infirmier avec la création très récente des infirmières de pratique avancée (IPA), dans une logique LMD.
  • L'universitarisation des études en soins infirmiers doit aboutir à leur intégration dans les facultés et la création d'un doctorat de soins infirmiers. Les autres professions non médicales doivent suivre ce schéma. Ce n'est pas le moment de créer une profession intermédiaire dont on voit mal où elle va se situer : en concurrence avec les IPA ? Cela ne remet-il pas en cause l'universitarisation de la formation en soins infirmiers ?
  • La création de cette profession médicale intermédiaire rappelle le XIXeme siècle. Le corps des officiers de santé permettait d'exercer la médecine sans en avoir le titre. En réalité, ceci s'est traduit par un consumérisme médical accru puisque les patients de l'époque allaient voir l'officier de santé puis le docteur en médecine. Veut-on tirer vers le bas la prise en charge de certains Français, dans certains territoires ? Si la réponse du gouvernement est de cette nature pour les déserts médicaux, cela revient à créer une médecine à deux vitesses et une intolérable inégalité géographique et sociale devant la maladie. Les patients défavorisés et les ruraux auront des officiers de santé, les autres de vrais docteurs en médecine !
  • Est-ce bien l'urgence aujourd'hui, à l'heure où tous les professionnels de santé doivent se coordonner, unir leurs efforts pour lutter contre une épidémie majeure et dévastatrice ? Il est temps de recentrer les efforts pour la santé sur les enjeux actuels et non de partir dans une déstructuration...
  • La solution aux déserts médicaux et notamment la difficulté de trouver un médecin traitant ou d'accéder à un médecin spécialiste, passe par l'attractivité des professions existantes, dont la médecine générale, et par la facilitation de leur exercice. Certainement pas par la création ex abrupto de "nouveaux métiers".

Les Français ont déjà du mal à s'orienter dans le système de soins. Créer une nouvelle profession va ajouter de la confusion. C'est bien d'une organisation rationnelle coordonnée dans les territoires dont ils ont besoin et pas d'une politique illisible où ils ne se retrouvent plus.

C'est pourquoi nous demandons le rejet de cette proposition de loi dans son article 1, afin d'apaiser l'ensemble des soignants et leur permettre de se concentrer sur les enjeux majeurs actuels.