LETTRE OUVERTE ANEMF x ISNAR-IMG x ISNI : À vous !

Le 14 octobre, 10 000 étudiants en médecine étaient dans les rues françaises, tous mobilisés pour notre avenir ...

Publié le 20 octobre 2022

Aujourd'hui s'ouvre l'examen du PLFSS à l'Assemblée Nationale. Il y a moins d'une semaine, le 14 octobre, nous, étudiants en médecine, étions dans la rue pour protester contre certaines des mesures et amendements portés dans ce projet de loi. Le 14 octobre notre proposition était claire :

  • Abandon des projets allongeant d'une quatrième année l'internat de médecine générale (article 23 du PLFSS et proposition de loi de Monsieur le Sénateur Bruno Retailleau).
  • Abandon de la dizaine de propositions de loi du Parlement visant à réguler l'installation ou des ouvertures au conventionnement sélectif du gouvernement (article 22 du PLFSS).

Notre position est et restera celle-ci.

À vous, qui souhaitez rétablir le dialogue social. Le 14 octobre, nous étions plus de 10 000 étudiants en médecine dans les rues françaises. Nous étions plus de 40% de grévistes dans nos services. Nous étions tous mobilisés pour notre avenir, celui des patients et celui du système de santé. Non, le dialogue social, ce n'est pas engager la concertation une fois que tout a été arbitré. Un faux dialogue autour de mesures contre productives ne les rendra pas meilleures.

À vous, qui souhaitez faire découvrir vos territoires. Nous ne demandons qu'à nous y déplacer, à la condition d'un accompagnement ! Dès demain : fournissez des indemnités de transport et d'hébergement adaptées, permettez l'ouverture massive de stages en ambulatoire et en centre hospitalier de périphérie et ce dès le début de nos études avec un encadrement adéquat... Notre refus d'une quatrième année d'internat de médecine générale est motivé par le constat d'une formation sur trois ans déjà dégradée. Le nombre de maîtres de stage universitaires est d'ores et déjà insuffisant pour l'encadrement des médecins de demain, qu'ils soient de 2e ou de 3e cycle. Moins de 50% des cours obligatoires sont assurés dans certaines subdivisions. Comment espérer améliorer la pédagogie et l'apprentissage sur quatre ans alors que nous ne sommes pas capables de l'assurer sur trois ?

À vous, qui récupérez un système de santé à bout de souffle et en pénurie de soignants. L'accroissement et le vieillissement de la population n'ont pas été anticipés et nous subissons la diminution, puis la réaugmentation tardive du nombre d'étudiants en médecine. Le problème est aujourd'hui numérique, mathématique : la pénurie est globale. Déplacer des médecins dans la commune de votre voisin alors que 87% du territoire est aujourd'hui officiellement en tension, et plus encore en réalité, ne facilitera en rien l'accès aux soins. Ce n'est pas aux patients de pâtir des inepties politiques passées. Ça n'est pas à nous, étudiants en médecine, de réparer les errements politiques.

À vous, qui souhaitez le meilleur pour vos électeurs. Ne tombez pas dans la démagogie des mesures de régulation à l'installation que certains vous décrivent comme l'ultime solution. Cela fait dix ans que nous proposons des solutions, viables et en lien avec la réalité du terrain. Écoutez ceux qui se sont engagés pour soigner, loin des intérêts électoraux. Ainsi, ne cédez pas au conventionnement sélectif. Il livrera certains patients à des tarifs de soins déconventionnés sans autre offre de santé. Ne cédez pas à l'obligation d'installation à la fin de nos études imposant un changement de médecin perpétuel qui dégradera leur suivi à long terme.

À vous, qui souhaitez décentraliser un système et accroître la place des collectivités territoriales. Libérez les initiatives locales fournies par les professionnels, les élus, les patients afin de gagner en efficacité pour une réponse urgente : la démocratie sanitaire ne doit pas être qu'un concept. La baisse démographique des médecins continuera inéluctablement de s'accentuer dans les dix prochaines années. Les médecins et futurs médecins que nous sommes, en ont conscience et sont prêts à poursuivre l'important investissement dont ils font aujourd'hui preuve. Ce n'est pas en nous contraignant que celui-ci perdurera. Ne l'oubliez pas : c'est bien grâce à notre investissement quotidien, parfois au dépit de notre formation, que survit aujourd'hui l'hôpital.

À vous, qui avez aujourd'hui le pouvoir de sauver ou achever le système de santé : écoutez les premiers concernés. Loin des intérêts corporatistes qui ont pu exister dans nos professions, les jeunes générations sont l'avenir d'un système de santé dans lequel ils veulent soigner au mieux leurs patients. Colloques, propositions de rendez-vous, documentation, ... Nos initiatives pour vous présenter nos solutions sont multiples et variées cependant vous y restez sourds.

Mesdames et Messieurs les parlementaires, Madame la Ministre, Monsieur le Ministre, écoutez enfin ce que nous proposons en vain depuis plusieurs années. Nous ne trouverons pas de solution unique et centralisée à un problème multifactoriel et territorial.

Mesdames et Messieurs les parlementaires, Madame la Ministre, Monsieur le Ministre, tant que nous ne serons pas plus écoutés, tant que nos revendications ne seront pas acceptées, nous continuerons à protester, nous continuerons à manifester notre désaccord dans les rues.